Interview avec Margaret Brennan de l’émission Face the Nation sur la chaîne CBS

Département d’État des États-Unis
Secrétaire d’État Mike Pompeo
Le 13 mai 2018

QUESTION : Nous voulons souhaiter la bienvenue au secrétaire d’État Mike Pompeo, notre premier invité ici dans les studios de Face the Nation. M. le secrétaire, merci de vous joindre à nous.

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : C’est un plaisir d’être avec vous. Bonne fête des mères ! Votre studio est magnifique.

QUESTION : Merci. Merci. La semaine a été extraordinaire à bien des égards pour vous. Je souhaite vous poser des questions sur la Corée du Nord. Ce pays a, par le passé, promis de démanteler ses sites nucléaires. Il dit qu’il va le faire à nouveau. Cette dernière promesse en date est-elle une mise en scène ou est-elle chargée de sens ?

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : Eh bien, ma visite a eu pour but de poser les bases de la préparation de la rencontre du président avec le dirigeant Kim le 12 juin, ce qui est dans tout juste 30 jours. Cela s’est déjà produit par le passé. Nous restons vigilants quant au fait que les Nord-Coréens ne se sont pas avérés dignes de leurs promesses. Mais nous espérons que cela sera différent et que nous ne répéterons pas le modèle traditionnel dans lequel ils font quelque chose et nous leur donnons de l’argent et les deux parties laissent tomber. Nous espérons que cela sera plus important, différent et plus rapide. Ce que nous demandons est la dénucléarisation complète et totale de la Corée du Nord et le président a l’intention d’y parvenir. Comme il l’a dit, nous verrons si cela fonctionne mais nous mettons en place les conditions propices à une rencontre couronnée de succès entre les deux dirigeants.

QUESTION : Avez-vous défini ce que vous entendez par dénucléarisation ?

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : Oui. Totale, pleine et entière.

QUESTION : Cela signifie un démantèlement complet…

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : Oui.

QUESTION : … l’arrêt de toute modélisation informatique…

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : Oui.

QUESTION : … l’abandon des centrifuges…

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : Oui.

QUESTION : … l’arrêt de toute activité d’enrichissement, l’accueil des inspecteurs sur le terrain ?

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : Oui, madame, tout comme cela aurait dû être fait avec l’Iran.

QUESTION : Donc pour vous, il s’agit de faire en sorte que cela en vaille la peine pour la Corée du Nord alors que sur le plan financier…

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : Oui.

QUESTION : … s’ils respectent les engagements. John Bolton a dit aujourd’hui sur une autre chaîne de télévision que personne ne devrait se tourner vers les États-Unis pour recevoir une aide économique, y compris la Corée du Nord.

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : Absolument.

QUESTION : Comment conciliez-vous ces deux choses ? Elles semblent être opposées.

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : Oh, c’est très, très… Non, non. Oh, non, madame. C’est très, très cohérent. Ce que le dirigeant Kim recevra des États-Unis est nos meilleurs… Nos entrepreneurs, nos preneurs de risque, nos fournisseurs de capital-risque et non nos contribuables. Ils recevront des personnes qui…

QUESTION : Des capitaux privés ?

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : Des capitaux privés entreront en Corée du Nord. La Corée du Nord a désespérément besoin d’un soutien énergétique, d’électricité pour son peuple. Elle est… Elle a grandement besoin d’équipements et de technologies agricoles, les meilleurs venant du Midwest, d’où je viens. Nous pouvons le leur donner. Et comme je l’ai dit plus tôt dans la semaine, nous pouvons mettre en place des conditions propices à une vraie prospérité économique pour le peuple nord-coréen qui rivalisera avec celle du Sud et c’est ce à quoi nous nous attendons. Ce ne seront pas les contribuables américains. Ce sera le savoir-faire, les connaissances, les entrepreneurs et les preneurs de risques américains, travaillant au côté du peuple nord-coréen pour créer une économie forte pour le peuple également.

QUESTION : Cela m’a tout l’air d’un relâchement des sanctions…

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : Et bien…

QUESTION : … Pour qu’une société puisse investir directement en Corée du Nord lorsque nous faisons cela…

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : Madame, si nous obtenons la dénucléarisation, bien entendu, les sanctions seront relâchées, très certainement. Cela ira encore plus loin. Ce sera un véritable… Le président s’est engagé et il s’engagera auprès du dirigeant Kim, j’en suis confiant, en lui disant que s’il fait ce qu’il doit faire pour que les États-Unis ne soient plus en danger face à son arsenal nucléaire et qu’il se débarrasse de son programme d’armes biologiques et chimiques et des missiles qui menacent le monde, nous nous assurerons que son peuple ait la possibilité de réaliser la grandeur que le dirigeant Kim, j’en suis convaincu, souhaite pour lui.

QUESTION : Peu nombreux sont les secrétaires d’État qui peuvent dire qu’ils ont ramené au pays trois Américains au cours de la deuxième semaine de leur mandat ou encore qu’ils ont été en Corée du Nord deux fois en six semaines. Mais je me demandais, dans vos interactions avec Kim, parce que vous avez interagi de visu, l’avez-vous assuré du fait que les États-Unis ne tentaient pas de le chasser du pouvoir ?

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : Je lui ai dit que ce que le président Trump voulait, c’était de voir le régime nord-coréen se débarrasser de son programme d’armes nucléaires complètement et totalement et, en échange de cela, nous sommes préparés à assurer que le peuple nord-coréen dispose des débouchés qu’il mérite tellement. C’est assez simple et je l’ai dit en début de semaine, je pense que, d’une certaine manière, le dirigeant Kim partage ce même objectif. Je pense qu’il comprend que le président Trump a mis en place une campagne de pression énorme avec pour but d’arriver à un objectif concluant pour la Corée du Nord et son peuple. C’est notre objectif. C’est le but américain que le président Trump a mis en place.

QUESTION : Ainsi, les États-Unis ne pensent plus que Kim Jong-un s’accroche à ces armes pour sécuriser sa place au pouvoir ? En d’autres termes, vous voulez dire qu’il ne s’agit pas de changer de régime ?

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : Seul le temps nous dira comment ses négociations évolueront. Le président s’exprime ainsi, il dit qu’on verra bien. Nous sommes… Il reste encore beaucoup à faire. Le leadership des États-Unis sous la houlette du président Trump est très attentif. Il se pourrait qu’on ne réussisse pas. C’est possible, nous reconnaissons ce fait. Nous avons déjà vu cela échouer par le passé. Mais le modèle qui est employé ici est fondamentalement différent et nous espérons obtenir un résultat fondamentalement différent.

QUESTION : À quoi ressemblera le sommet de Singapour ? Serez-vous dans la salle à côté du président Trump en face de Kim Jong-un ?

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : Je ne sais pas.

QUESTION : Vous ne le savez pas encore ?

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : Je ne sais pas. Nous travaillons sur les détails, sur la rencontre à proprement parler. Nous y travaillons depuis des semaines. Nous avons des équipes qui continueront à y travailler dans les jours et semaines à venir. Il nous reste une trentaine de jours, je pense, et il y aura beaucoup à faire entre les deux pays et entre maintenant et ce jour-là pour finalement mettre en place tout ce qu’il faut pour ce que nous espérons être une rencontre couronnée de succès à Singapour entre nos deux dirigeants.

QUESTION : Vous êtes donc toujours en train de travailler sur les questions protocolaires mais vous êtes la personne qui a passé le plus de temps avec Kim Jong-un.

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : Et j’ai…

QUESTION : Qu’est-ce qui vous a frappé chez lui ?

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : Ce qui m’a frappé chez lui… le fait qu’il soit très informé, il connaît bien les dossiers. Il est très compétent lorsqu’il s’agit de participer à des discussions complexes. Lorsque je lui ai posé une question sur quelque chose qui n’était pas tout à fait prévue, il y a répondu. Il n’a pas de fiches. C’est le dirigeant Kim, dans ce cas-là, qui interagit avec moi directement, avec qui j’ai une discussion solide sur les grandes lignes de ce que des négociations réussies entre nos deux pays pourraient être à termes.

QUESTION : Vous avez ramené au pays ces trois Américains de Corée du Nord. L’Iran détient encore au moins quatre Américains. Les familles sont préoccupées quant au fait que la déchirure diplomatique, la sortie de l’accord sur le nucléaire, présente un danger pour leurs proches. Que pouvez vous leur dire ?

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : Deux choses. Tout d’abord, tout le monde doit savoir que notre administration a l’intention de ramener au pays tous les Américains détenus où que ce soit dans le monde. Nous avons le pasteur Brunson en Turquie que nous souhaitons désespérément ramener à la maison. Nous avons d’autres personnes détenues en Iran et en Syrie. Nous travaillons assidûment au retour de chacun d’entre eux.

En ce qui concerne la question de savoir si les actions de la semaine dernière vis-à-vis du Plan d’action global conjoint a accru le danger, je pense que c’est ridicule. Le mauvais comportement de l’Iran s’est aggravé, il n’a fait que s’aggraver durant le Plan d’action global conjoint.

QUESTION : Êtes-vous disposé… Êtes-vous toujours disposé à réaliser un échange de prisonniers avec l’Iran ?

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : Je ne peux pas vous donner de réponse à cette question. Nous n’avons rien donné en échange de la libération de ces détenus de Corée du Nord. Ils sont rentrés parce que le dirigeant Kim a pensé qu’il était dans son intérêt de le faire et nous lui en sommes reconnaissants. Et nous espérons que M. Rouhani, qui se dit être occidental, libèrera les détenus iraniens également. Il parle du fait qu’il souhaite que les Européens travaillent en Iran. La moindre des choses serait pour lui de libérer toutes les personnes que ce pays, le pays de M. Rouhani, détient.

QUESTION : Fondamentalement, un certain nombre de nos alliés européens, comme vous le savez… Je suis sûre que vous avez eu des conversations difficiles au cours des derniers jours, ils sont frustrés quant au fait que les États-Unis aient coupé court à la diplomatie, à leur sens. Ils ont indiqué dans une conversation avec vous vendredi dernier que vous leur avez assuré qu’ils avaient… qu’ils étaient proches d’un accord en marge pour la prise en charge des éléments qui inquiètent le président Trump. Pourquoi ne pas tenter ? Pourquoi ne pas terminer cela ? Pourquoi le président y a-t-il coupé court ?

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : Oh, Margaret, nous l’avons fait. Nous avons essayé. Le président a donné un ensemble d’objectifs. Il m’a chargé, au cours de mes deux ou trois premières semaines, de travailler avec les Européens et d’essayer de le faire, bien que les travaux aient démarré avant mon arrivée au département d’État. Et à aucun moment nous avons été en mesure d’arriver à un accord. Les Européens ne voulaient simplement pas adhérer aux exigences pour corriger l’accord. Et ils ont donc eu 90 jours environ. Nous étions…

QUESTION : Oui. Ils pensaient disposer de cinq jours de plus et pouvoir y parvenir grâce à la clause de caducité.

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : Margaret, nous avons eu 90 jours pour travailler dessus. Et vous devez savoir que nous continuons d’y travailler. Les présidents Trump et Macron ont tous les deux dit que nous souhaitions obtenir un accord convenable, un accord plus large. Nous allons travailler dur dans les semaines à venir. J’espère contribuer à cette réalisation de manière centrale. Ce serait une chose formidable que d’arriver à faire en sorte que les Européens le fassent.
Mais, Margaret, je souhaite ajouter ceci : fondamentalement, ce qui s’est passé avec le Plan d’action global conjoint est que la création de richesses de l’Iran a alimenté son comportement malveillant. L’argent que l’Iran a eu pour lancer des missiles sur Riyad et Israël… mettant ainsi des Américains en danger, a été fourni par les avantages économiques obtenus par le biais du Plan d’action global conjoint. Le président Trump veut les priver de ces ressources.

QUESTION : Donc, fondamentalement, êtes-vous en train d’essayer de négocier un nouvel accord sur le nucléaire ou essayez-vous de mettre sur pied une coalition pour vaincre l’Iran ?

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : Nous allons mettre sur pied une coalition qui résistera non seulement au programme nucléaire de l’Iran, dont ils, Margaret, continuent d’ailleurs à nier l’existence. Aucun dirigeant iranien n’a reconnu l’existence du programme d’armes et les faits quant à son existence sont désormais publics. Ils doivent au moins être honnêtes là-dessus. Mais il ne va pas simplement s’agir du dossier nucléaire. Il s’agira également du programme de missiles. Il s’agira de leurs efforts d’édification du Hezbollah. Il s’agira du fait qu’ils menacent Israël. Il s’agira de leur travail au Yémen pour lancer des missiles en Arabie saoudite, pour l’amour du ciel.
Ce sont les activités que le régime iranien a entreprises alors que le Plan d’action global conjoint était en vigueur. Nous allons procéder à un changement. Nous allons nier à l’Iran tout avantage de richesse économique et exercer une pression réelle de manière à ce qu’il cesse de parrainer à large échelle le terrorisme comme il le fait depuis des années.

QUESTION : M. le secrétaire, merci d’avoir participé à Face the Nation.

M. LE SECRÉTAIRE POMPEO : Merci beaucoup, Margaret. Bonne fête des mères à vous !

QUESTION : Merci.