Allocution de l’envoyé spécial du président auprès de la Coalition mondiale contre Daech, M. Brett McGurk lors de la réunion en petit groupe

Département d’État des États-Unis
Le 13 juillet 2017
Washington

EXTRAITS

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Nous reconnaissons tous avec gratitude la dette que nous devons au leadership du Premier ministre Abadi et à l’héroïsme des forces de sécurité iraquiennes, aux Peshmerga kurdes et à tant de volontaires qui ont pris les armes contre Daech. Ces forces ont subi des pertes importantes dans l’une des batailles urbaines les plus difficiles et les plus intenses depuis la Seconde Guerre mondiale, tout en accordant la plus haute priorité à la protection de la population civile dans leur plan de campagne.

Comme le président Trump l’a déclaré au Premier ministre Abadi lors d’un appel téléphonique il y a quelques jours, la libération de Mossoul constitue une étape importante de notre lutte commune contre Daech, mais elle ne signifie pas la fin de la guerre ; nous sommes engagés, en tant que pays et en tant que coalition, à assurer la destruction totale de Daech.

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En juin 2014, Daech, dont les rangs comptaient des dizaines de milliers de combattants étrangers venant de 120 pays différents, avait réussi à accumuler et à faire manœuvrer de larges formations militaires en Iraq et en Syrie, et ce, presque sans opposition. Des journalistes et des analystes avaient prédit la chute imminente de Bagdad. Daech a encerclé et massacré un par un les 1 700 cadets de la force aérienne iraquienne près de Tikrit, avant d’en télécharger les images sur YouTube. Le groupe a commis des actes de génocide contre des groupes minoritaires, des Yézidis et des chrétiens, et a assassiné tous ceux qui contestaient sa loi. Le porte-parole de Daech, un terroriste répondant au nom de Mohammed Adnani, a déclaré : « cette bataille fera bientôt rage à Bagdad ». Il a déclaré au monde que ce soi-disant califat, je cite, « allait rester en place et s’étendre dans tout le Moyen-Orient et en Europe » ; il a appelé les musulmans du monde entier à venir se joindre à leur combat en Syrie et en Iraq.

Daech, bien sûr, n’a jamais atteint Bagdad. Le peuple iraquien et ses forces de sécurité, avec le soutien de beaucoup d’entre vous dans cette salle, se sont regroupés et ont riposté. Aujourd’hui, le soi-disant califat de Daech  rétrécit rapidement et les unités que nous avons formées dans le cadre de la coalition en Iraq n’ont jamais perdu une bataille. Je pense que cela mérite qu’on s’y attarde un moment. Dans le cadre de la coalition, nous avons maintenant formé plus de 100 000 membres des forces de sécurité iraquiennes, et les unités que nous avons formées ont vaincu Daech dans chacun des combats où elles étaient engagées. En outre, ces unités font maintenant la fierté de l’Iraq.

Pas plus tard que la semaine dernière, lorsque les forces d’élite iraquiennes antiterroristes ont commencé à recruter des candidats pour pourvoir 3 000 postes, ils ont reçu près de 300 000 candidatures. C’est une tendance remarquable et un changement total par rapport à il y a seulement trois ans.

Le terroriste que j’ai mentionné plus tôt, Mohammed Adnani, qui avait prévu également de mener des attaques à l’étranger, y compris à Paris et à Bruxelles, est décédé ; il a été tué lors d’une attaque aérienne de la coalition l’année dernière, près de la ville syrienne d’al-Bab. Presque tous les dirigeants de Daech partagent ce même sort.

Au total, les forces iraquiennes, soutenues par notre coalition, ont libéré plus de 65 000 kilomètres carrés de territoire en Iraq et en Syrie. L’ensemble de ce territoire n’a pas été repris. Daech n’a récupéré aucune partie de ce territoire. Nous avons libéré plus de 4 millions de personnes qui vivaient sous l’emprise de Daech en 2014 et surtout nous avons aidé à créer des conditions permettant aux gens de rentrer chez eux.

Rien qu’en Iraq, presque 2 millions de personnes ayant fui Daech sont maintenant retournées dans leur foyer pour redonner vie à leurs communautés auparavant contrôlées par ces terroristes. Ce taux de retour dans un environnement post-conflit est historiquement sans précédent : c’est un témoignage de ce que nous avons réussi à faire, en collaborant au sein de notre coalition.

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À Mossoul, nous avons travaillé main dans la main pendant six mois dans le cadre d’un plan de campagne militaire, politique et humanitaire. Sur le plan politique, grâce au leadership du Premier ministre Abadi et du président de la région iraquienne du Kurdistan, Massoud Barzani, nous nous sommes efforcés de garantir une pleine coopération entre les forces de sécurité iraquiennes et les Peshmerga, un niveau de coopération que nous avons pu observer plus tard sur le terrain. Rares étaient ceux, Daech compris, qui s’attendaient à cela.

Nous avons soutenu la politique du Premier ministre Abadi et la politique du gouvernement iraquien en matière de décentralisation, d’autonomisation des populations locales (afin de l’aider à prendre en charge ses collectivités après la bataille) et de mise en place d’une coordination complète entre les autorités régionales, provinciales et nationales.

Sur le plan humanitaire, nous avions prévu, avec l’aide de l’ONU et du gouvernement iraquien, que près d’un million d’habitants de Mossoul seraient déplacés. Notre coalition a levé les fonds nécessaires pour que les Nations unies et les ONG associées aient les ressources nécessaires pour faire face à tous les scénarios, même aux pires. À ce jour, la campagne de Mossoul a conduit au déplacement de presque 940 000 personnes ; et notre collègue, Lise Grande, ici présente, qui a dirigé l’intervention humanitaire pour le PNUD, fournit des rapports selon lesquels chacun d’entre eux, sans exception, a reçu une assistance et des secours. Lise a accompli un travail extraordinaire, et je pense que chacun d’entre nous lui doit respect et gratitude. Je pense qu’il s’agit, vraiment, d’une combinaison sans précédent d’une intervention militaire et humanitaire, avec collaboration au sein de la communauté internationale.

En ce qui concerne les efforts de stabilisation: nous avions anticipé la suite et mis l’accent sur les besoins immédiats, y compris le recrutement des forces de police locales, la neutralisation des mines laissées par Daech, le retour à la normale de l’électricité, de l’accès à l’eau et des égouts, ainsi que l’enlèvement des gravats et la mise en place de programmes de travail. Les résultats sont maintenant visibles dans la partie est de Mossoul où, quelques mois seulement après la bataille, plus de 220 000 personnes sont rentrées dans leur foyer. 350 000 garçons et filles (350 000 garçons et filles qui, il y a six mois, vivaient sous l’emprise de Daech) sont maintenant retournés à l’école. Les marchés sont animés et la vie reprend dans les rues. Même dans la partie ouest de Mossoul, où la bataille a été plus intense ces quatre derniers mois, nous assistons au retour de milliers de personnes regagnant leurs foyers et commençant, petit à petit, à reprendre le cours de leur vie après Daech.

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Il s’agit d’une guerre, et malgré ça les forces iraquiennes ont fait de la protection des populations civiles une priorité de leur mission, souvent au péril de leur vie. Dans les cas où les forces iraquiennes n’ont pas honoré leurs propres normes de comportement strictes, le gouvernement iraquien a décidé d’enquêter sur les allégations, une démarche que nous encourageons.

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La bataille en Iraq est loin d’être terminée. Les forces iraquiennes, avec notre soutien, se déplaceront bientôt pour aller libérer les territoires encore contrôlés par Daech, y compris Tel Afar, Hawija et Al-Qaim. Nous les soutiendrons dans leur campagne militaire et dans ce qui suivra, au niveau de l’aide humanitaire, des efforts de stabilisation et de la gouvernance. C’est pourquoi nous sommes ici.

Et au nom du président Trump et du secrétaire Tillerson, les États-Unis demandent à ce que tous les membres de notre coalition identifient de nouveaux domaines auxquels ils pourraient contribuer. À ce jour, dans le cadre de la coalition, les États-Unis ont fourni près des trois quarts des ressources militaires nécessaires à l’appui de nos partenaires sur le terrain, mais seulement un quart… les États-Unis n’ont fourni qu’un quart des ressources financières pour l’aide humanitaire et les efforts de stabilisation, le reste étant pris en charge par notre coalition. Ce ratio, avec des contributions quatre fois plus élevées pour la coalition que pour les États-Unis en ce qui concerne la phase post-Daech, doit se maintenir et être davantage développé pour les mois à venir, qui s’avèreront vitaux. Et les besoins restent vastes.

Lors des réunions de nos groupes de travail hier, l’ONU a lancé un appel pour un financement total de 1,3 milliards de dollars pour les besoins humanitaires et de stabilisation pour la période suivant la défaite de Daech. Près des trois quarts de cet appel se concentrent sur la stabilisation, particulièrement à Mossoul et dans les zones les plus touchées. Et, compte tenu des accomplissements de nos programmes de stabilisation jusqu’à ce jour, avec suivi et comptabilisation du moindre dollar, euro ou dinar, et le retour de près de 2 millions de personnes chez elles, l’investissement en vaut la peine et contribue à empêcher Daech de revenir.

Les États-Unis ont annoncé la semaine dernière une contribution supplémentaire de 150 millions de dollars à ces programmes de stabilisation. Aujourd’hui, nous annonçons plus de 119 millions de dollars supplémentaires en assistance humanitaire et nous espérons voir des contributions semblables de la part des partenaires ici présents dans les semaines à venir.

À long terme, le gouvernement iraquien a élaboré des projets de réforme économique et d’investissement s’étendant jusqu’en 2030. Il s’agit du plan Vision 2030, programme présenté à la Banque mondiale lundi dernier. Les États-Unis soutiennent pleinement cette initiative et nous félicitons l’Iraq de son travail avec la Banque mondiale et le FMI pour stabiliser sa situation macroéconomique et mettre en œuvre des réformes essentielles à une croissance pérenne.

Notre partenaire de la coalition, le Koweït, et d’ailleurs nous souhaitons la bienvenue au Koweït aujourd’hui, sur l’invitation de Son Altesses Sheikh Sabah, organisera une réunion sur la reconstruction de l’Iraq à long terme au début de l’année prochaine et nous nous félicitons de cette importante initiative.

Nous nous félicitons également de l’ouverture historique entre l’Iraq et l’Arabie saoudite, marquée par la visite dans le royaume du Premier ministre Abadi, qui a débloqué la situation le mois dernier et des travaux continus de remise en état des voies commerciales vitales entre l’Iraq, l’Arabie saoudite, le Koweït et la Jordanie.

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La situation en Syrie est bien plus compliquée. Il n’y a pas de gouvernement avec lequel nous pouvons collaborer en Syrie.

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La coalition peut toutefois tirer des enseignements de ce qui a fonctionné en Iraq et, dans l’attente d’une résolution de la situation politique à plus long terme, nous nous concentrerons sur les besoins immédiats de stabilisation des communautés libérées du joug de Daech à la suite d’interventions de la coalition. Notre but essentiel consiste à mettre en place les conditions qui permettront à la population locale des zones libérées du contrôle de Daech de redonner vie à leur communauté et aux personnes déplacées à l’intérieur du pays de retourner chez elles.

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Lundi, à la veille de ces réunions ici à Washington, une décision importante a été prise le Fonds fiduciaire pour le redressement de la Syrie (Syrian Recovery Trust Fund SRFT) avec l’approbation de l’expansion d’un mécanisme multi donateur essentiel dans les zones libérée du contrôle de Daech, y compris Raqqa. Il s’agit d’une décision importante et opportune qui libérera potentiellement des centaines de millions de dollars pour la prise en charge des besoins de stabilisation immédiats de la population locale.

En outre, sur la base des enseignements tirés de l’expérience en Iraq, nous lançons aujourd’hui une nouvelle initiative au sein du Groupe de travail sur la stabilisation de la coalition, à savoir un consortium pour le rétablissement précoce des zones libérées. Ce consortium aura pour but d’unir les bailleurs de fonds autour de la restauration des services essentiels, avec des listes de projets classés par ordre de priorité de la population locale, sur la base du modèle qui a fonctionné en Iraq.

À l’intérieur de la ville de Raqqa, la bataille se poursuit à l’heure où nous parlons et est assez intense. Les Forces démocratiques syriennes sont entrées dans le centre de la ville, après avoir surmonté plusieurs barricades de défense, des ceintures d’engins explosifs artisanaux, des nids de tireurs embusqués, des tunnels et des kamikazes à bord de véhicules blindés. Elles ont déjà perdu un grand nombre des leurs, et il y aura d’autres pertes en avançant pour dégager la ville, mais nous sommes fiers de les soutenir.

Notre planification pour la stabilisation évoluera parallèlement au déroulement de la bataille dans les semaines et mois à venir, comme cela a été le cas à Mossoul. Nous avons identifié une centaine de sites de stabilisation critiques dans Mossoul et ses alentours qui seront prioritaires pour le déminage et la restauration. La gouvernance locale de Raqqa, dans les phases initiales, sera prise en charge par le conseil civil de Raqqa désormais basé à Ayn Issa au nord de Raqqa. Ce conseil compte près de 120 personnes, la plupart étant restée en Syrie au cours de la guerre civile et ayant quitté Raqqa et d’autres villes de la province à l’arrivée de Daech.

Ce conseil intérimaire bénéficiera du soutien des États-Unis pour permettre une stabilisation immédiate. Il s’engage à accueillir les exilés de retour, y compris les membres de l’ancien conseil qui a temporairement gouverné Raqqa en 2013, et nous encourageons ces personnes exilées à rentrer en Syrie. Il est important de noter que le conseil s’est également engagé à tenir, d’ici mai de l’année prochaine, un scrutin municipal pour élire un nouveau conseil, assurant ainsi que les habitants de Raqqa pourront choisir leurs propres leaders, en attendant une solution ultime à la guerre civile en Syrie. Et nous soutenons cette initiative.

Alors que nous nous attelons à la défaite de Daech en Syrie, nous nous sommes également engagés envers la désescalade de la guerre civile sous-jacente par le biais de cessez-le-feu ou d’autres accords. Nous sommes encouragés par les accords récents d’harmonisation des zones de conflit sur lesquelles se sont entendus nos armées et la Russie et qui ont permis d’accélérer le rythme des opérations contre Daech.

Nous sommes également encouragés par le cessez-le-feu dans le sud-ouest de la Syrie approuvé par les présidents Trump et Poutine il y a tout juste une semaine. Cette initiative a fait l’objet de négociations laborieuses entre la Jordanie, les États-Unis et la Russie. Il s’agit d’un exemple parmi tant d’autres de désescalade de la guerre sous-jacente, de maintien de l’intégrité territoriale de la Syrie et de la mise en place de conditions préalables à une résolution de la situation politique menée par la Syrie qui corresponde à la résolution 2254 du Conseil de sécurité de l’ONU. Nous demandons donc à toutes les parties impliquées dans ce terrible conflit d’assurer le maintien du respect de l’accord de cessez-le-feu car il est défini par une ligne de contact tracée avec beaucoup d’attention.

Au-delà de l’Iraq et de la Syrie, notre coalition se concentre aussi sur les réseaux et les affiliés de Daech partout dans le monde. Ici au département d’État, au cours des quelques dernier jours, nos groupes de travail se sont concentrés de manière intense sur la réduction du flux des combattants étrangers, la lutte contre le financement de Daech, la lutte contre sa propagande fausse et les zones dans lesquelles Daech cherche à s’implanter alors qu’il perd son soi-disant califat en Iraq et en Syrie.

Nous avons réalisé des progrès dans tous ces domaines. Il est maintenant extrêmement difficile pour les combattants étrangers d’entrer en Syrie et nous exprimons notre reconnaissance envers la Turquie pour les efforts qu’elle a déployés afin de rendre ses frontières imperméables face à ces combattants. Pour ceux qui y sont entrés plus tôt, notre mission consiste à nous assurer qu’ils ne pourront pas en ressortir et qu’ils meurent en Iraq ou en Syrie. Entretemps, nous créons actuellement une base de données internationale des combattants étrangers connus. Elle contient à l’heure actuelle 18 000 noms qui ont pu être vérifiés avec le soutien d’Interpol, partenaire de notre coalition.

La propagande de Daech perd également du terrain et de la crédibilité grâce à notre travail avec des partenaires clés, les Emirats arabes unis, l’Arabie saoudite, le Royaume-Uni, ainsi que grâce aux efforts du secteur privé, Twitter, Facebook et YouTube, qui ont tous récemment amélioré leur capacité à suivre et éliminer le contenu pro Daech au quotidien.

Le financement de Daech est désormais entièrement auto généré en Iraq et en Syrie, et les pertes de terrain s’accompagnent d’une perte de ressources, ciblées sans relâche par notre campagne militaire. Comme nous le savons, la défaite du réseau de Daech à long terme nécessitera un réseau mondial, et c’est ce que cette coalition représente.

Cet après-midi, nous parlerons de l’extrémisme et des réseaux de Daech en Afrique, et nous avons le plaisir d’accueillir aujourd’hui trois des membres les plus récents de la coalition : le Tchad, le Niger et Djibouti.

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En effet, alors que nous luttons contre Daech en Iraq et en Syrie, cette coalition extraordinaire continue à s’agrandir. L’OTAN nous a rejoints en mai, et nous comptons désormais 72 membres, dont 68 pays et quatre organisations internationales, l’UE, la Ligue arabe, Interpol et l’OTAN. Elle compte désormais parmi les plus grandes coalitions du genre jamais créées.

Bien entendu, nous ne pouvons occulter le fait que de nombreux pays représentés dans cette salle, bon nombre de pays au sein de la coalition, ne s’accordent pas toujours sur tous les sujets. Et c’est la nature-même d’une coalition. C’est pourquoi nous nous réunissons régulièrement dans des forums tels que celui-ci. Il est toutefois évident que, trois ans après les débuts de cet effort international, nous sommes unis, 72 membres du monde entier, et partageons le même objectif, la destruction de Daech et la protection de nos concitoyens et patries par le biais de la coopération.

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Nous vous proposons cette traduction à titre gracieux. Seul le texte original en anglais fait foi.